UNE IMPORTANTE DÉCLARATION MINISTÉRIELLE

Publié le par Yaqzan

 

 

Ou de la vacuité du tambour au fil des siècles

 

 

Il parait que nos ministres se sont donné beaucoup de mal pour arrêter le texte de la Déclaration qui, cet après-midi, sera lue aux Chambres.

Sans connaître encore la teneur exacte de ce document, je crois pouvoir affirmer cependant que rien, dans sa lecture, ne nous donnera l'impression qu'à la rédiger M. Fillon et ses collaborateurs risquèrent une méningite.

Et pourtant, ils s'y sont tous appliqués, M. Morin, M.Baroin et, j'imagine aussi, M. Hortefeux. Et l'on assure même qu'il ne fallut pas moins, pour tout mettre au point, que le coup de pouce final de M.Sarkozy.

C'est qu'une déclaration ministérielle doit être un chef-d'oeuvre, le chef-d'oeuvre de l'art de dire des choses qui ne veulent rien dire: et il faut croire que ce n'est pas toujours commode. Il m'est arrivé, jadis, de plaider second dans une affaire, d'ailleurs assez banale, de cambriolage et de complicité d'assassinat, après un fameux avocat, vieux routier des Assises, qui défendait le chef de la bande:

- "Et maintenant, Messieurs les jurés, concluait le vieux maître d'une voix vibrante, j'ai cette sécurité que vous demeurerez invulnérables à toutes les flèches spécieuses des arguments de l'accusation, impuissante à entamer le bouclier de votre conscience et le triple airain des justes lois!".

Le vieux maître se rassit après cette superbe envolée et, s'étant tourné vers moi, à mi-voix:

- Ça, mon petit, murmura-t-il, ça signifie que je m'en f... !

 

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                Daumier. Le banc des ministres 1834

 

La plus éloquente des déclarations ministérielles me fait toujours un peu songer à l'éloquente péroraison du vieil avocat....

(Ce texte est une mise à jour d'un billet publié dans "L'Écho de Paris" du 22 juin 1906 alors que le gouvernement était présidé par M. Sarrien et la République par M. Fallières).

Publié dans Humeurs

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