La "Geste libyenne" de BHL et Sarkozy

Publié le par Yaqzan

Quand Levy se prend pour Malraux et Sarkozy pour le "Chevalier blanc" universel

L'éloge dithyrambique sinon passionné  fait par Christophe Barbier (1) à Bernard-Henri Lévy et Nicolas Sarkozy à propos de leur "geste libyenne" me laisse perplexe. À grand renfort d'envolées lyriques l'auteur développe d'un bout à l'autre de son article la référence constante de BHL à André Malraux et à la guerre d'Espagne, un André Malraux, "omniprésent absent, tel un Faust en robe de muse" dans une épopée libyenne dont les personnages principaux seraient Nicolas Sarkozy et BHL lui-même.

"Oui, dans les cailloux du Djebel Nefoussa, sous les étoiles de Tobrouk (...) Lévy tient la plume, Malraux crache l'encre". Et puis encore, "chez Lévy, l'écrivain, pour sculpter l'histoire, tient le burin et guide le marteau du politique". Pour BHL, selon Barbier, il s'agit ainsi d'inscrire enfin le droit d'ingérence dans l'action armée. Ce qui veut dire "dépasser la jérémiade humanitaire". Tout cela au nez et à la barbe de la diplomatie, ce qui, n'en doutons pas, ouvrirait la porte à la multiplication d'aventures militaires dangereuses pour la paix du monde.

D'ailleurs, Barbier affirme, dans un éloge non moins lyrique fait à Sarkozy, que "la victoire en Libye est le meilleur de son quinquennat". "A-t-il cherché une geste gaullienne en lançant ses avions? Ses confidences à BHL évoquent Lawrence d'Arabie et un 'mirage arabe' très français", écrit-il encore, ajoutant, inspiré par Malraux,  que dans le "pari" de Sarkozy il y eut sans doute aussi de la "mythomanie épique". On en reste baba et on finit par se demander si en fin de compte Barbier ne se paie pas la tête de ses deux héros.

Ce romantisme exacerbé me semble extrêmement léger au regard de la réalité douloureuse des faits. À cet égard, la photo qui accompagne le texte parle d'elle-même, mais pour Lévy il semble que ces destructions comme les morts ne soient que des détails de l'histoire.

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L'ange de l'Apocalypse (Photo M. Roussel dans l'Express)

Enfin la référence à l'action de  Malraux dans la guerre d'Espagne à  propos de l'aventure libyenne est non seulement un énorme contresens historique mais une injure faite à l'auteur de "l'Espoir". Malraux et les autres combattants des "Brigades internationales" (2) défendaient l'état républicain espagnol contre la Rébellion fasciste conduite par Franco. Quant aux bombardements massifs ils étaient opérés par l'Allemagne nazie et l'Italie fasciste contre les défenseurs de l'état républicain. Rappelons-nous celui de Guernica, immortalisé par Picasso.

(1) L'Express du  9/11 à propos du livre de bHL "La Guerre sans l'aimer"

( 2 ) Environ trente mille volontaires anti-fascistes venus de 53 pays.

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