ÉGYPTE: L'INTIFADA A VAINCU MAIS ...
La révolution reste à faire
foule immense place tahrir au Caire 8/07 (Reuters/Libération)
Toutes les révolutions en marche ont une tendance naturelle à rejeter ce qui vient du régime déchu. Il faut éviter de céder à cette tendance et protéger ce qui a pu être réalisé de positif par ce même régime.
Nous nous félicitons tous chaleureusement du "Printemps égyptien" mais on voit aujourd'hui des "barbus" vouloir remettre en question les dispositions prises au bénéfice des femmes grâce en particulier à l'action de Mme Suzanne Moubarak. l'épouse du président renversé.
Or, des femmes estiment aujourd'hui avoir toute raison de craindre une éventuelle remise en cause du code de la famille qui leur donne le droit de demander le divorce et de se libérer de la tutelle de leurs maris en matière administrative, ou encore, dans un autre domaine, le refus d'interdire l'excision, question dans laquelle Mme Moubarak s'était personnellement engagée malgré l'hostilité résolue des Frères Musulmans et l'inertie timorée d'al-Azhar.
Ce que veulent les égyptiens vraiment révolutionnaires c'est l'égalité en droit des hommes et des femmes (non stipulée dans la constitution révisée), la liberté de conscience, le respect des minorités, notamment coptes, l'éradication de la corruption, une démocratie représentative de tous les courants de pensée, la séparation du religieux et de l'état ainsi que l'éradication du clientélisme, qui a été l'une des des plaies majeures de la politique égyptienne depuis plus d'un demi-siècle.
Au delà des droits que la citoyenneté leur confère, les jeunes Égyptiens ont en premier lieu besoin de trouver un emploi à la fin de leurs études pour pouvoir vivre décemment, se loger et se marier. Dans son ensemble et en premier lieu, la population égyptienne ne demande que du travail, du pain et un logement. Ce n'est pas un hasard si les travailleurs organisés du grand centre industriel textile de Mahalla-l-Koubra ont joué un rôle de premier plan dans le mouvement révolutionnaire.
Dans un tout autre domaine, si l'on veut que l'Égypte progresse vers la tolérance religieuse puis, à terme, la laïcité, il convient de réformer d'urgence l'enseignement scolaire, où une place exorbitante est faite à l'enseignement de l'Islam qui ne tient aucun compte de l'évolution de la société ni même des exégèses les plus modérément réformistes.
Compte tenu de la large implantation de l'Organisation des Frères musulmans et de sa puissance, les partis non-religieux encore insuffisamment organisés, auront fort à faire.
Nota: Dans le titre, j'utilise le mot "Intifada", qui signifie "sursaut" ou soulèvement et qui me semble mieux rendre compte de l'événement