BHL: MÉMOIRE COURTE ET FAUX-FUYANTS

Publié le par Yaqzan


Coup de sang?

Après l'épisode de la flottille pour Gaza, Bernard-Henri Levy a commis un long texte ("Libération" du 08/06) dans lequel il prend la défense d'Israël contre tous ceux qui selon lui manipulent l'opinion au détriment de l'Etat hébreu. Dans ce texte dont le ton passionnel frise la paranoïa, notre philosophe multimédia égraine une suite d'invectives, de semi-vérités, de procès d'intention, d'affirmations accusatrices péremptoires et récuse tout de go  l'honnêteté des membres de la Commission des Droits de l'Homme de l'ONU, qui se feraient les complices du mouvement "islamo-fasciste" qu'est selon lui le Hamas. Et tout cela au motif que cette commission compte dans ses rangs des Pakistanais, des Cubains et des Iraniens.

Ce texte traduit semble-t-il la rage de BHL devant le renversement progressif  de l'opinion naguère quasi-inconditionnellement favorable à l'Etat hébreu mais aujourd'hui déçue par la brutalité de celui-ci. Mais il se caractérise surtout par son silence assourdissant à propos des bombardements massifs perpétrés par l'armée israélienne sur la population civile palestinienne de Gaza, bombardements aveugles  qui ont atteint le sommet de l'horreur avec l'opération "plomb durci" de la fin décembre 2008. 

Mémoire courte ou faux-fuyant?

 BHL a la mémoire courte.  Gaza, est aujourd'hui le bastion du Hamas, présenté comme le pire ennemi d'Israël alors qu'il  est le meilleur allié des "faucons" qui dirigent aujourd'hui cet état. Ne leur sert-il pas d'alibi pour la poursuite de leur politique expansionniste? Pourquoi ne pas rappeler qu'Israël ou plutôt ses dirigeants, ont favorisé la montée en puissance de ce mouvement pour mettre sur la touche une autorité Palestinienne prête à des négociations de paix. N'était-ce pas là un bon moyen de se dérober. Ce qui est en cause c'est précisément la recherche d'une paix juste pour tous. Le reste, comme cette rocambolesque aventure maritime, n'est qu'anecdotique mais il sert à BHL d'écran de fumée pour mieux éviter d'entrer dans le vif du sujet, à savoir le droit des Palestiniens à un état dont seule l'existence donnera à celle d'Israël sa légitimité. Or il semble qu'à Tel-Aviv on préfère exister par la force du fait accompli plutôt que par la force du Droit.

La solution appartient d'abord aux Israéliens

Il est clair qu'Israël ne peut tenir sa légitimité que de l'existence à son côté d'un état palestinien.  De cette coexistence mutuellement acceptée dépendra son insertion dans la région où il s'est établi et où il n'est aujourd'hui qu'un corps étranger. Je suis intimement convaincu que, le premier pas franchi, la quasi totalité des états de la région, qui ne peuvent accepter le "fait accompli israélien" , accepteront avec réalisme le "fait israélien"  dans son respect de l'ordre international. C'est de cette démarche que dépend la survie d'Israël car rien n'est plus hasardeux pour cet état que la recherche d'une légitimité fondée sur un fait accompli qu'on prétendrait établir dans la longue durée pour qu'il finisse par s'imposer  à l'ordre international alors que les rapports de forces économiques et stratégiques mondiaux sont en voie de mutation. En un mot, l'attitude du gouvernement  israélien est aujourd'hui suicidaire. A cet égard, il faut saluer ceux qui, en Israël, sont conscients de cette réalité et manifestent pour la paix, tant il est vrai que la solution appartient d'abord aux Israéliens.

Après avoir lu la charge pro-israélienne de Bernard-Henri levy, il est rafraîchissant de lire la lettre lumineuse et courageuse de Régis Debray à son "ami israélien" et la réponse lucide de celui-ci, Elie Barnavi, autre philosophe au vrai sens du terme.

Publié dans Politique

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