AUTOPORTRAIT DE L'INTÉGRISME ISLAMIQUE

Publié le par Yaqzan

 
Ou le confort béat de l'anesthésie intellectuelle

"En vérité je te le dis
Dors en toute sérénité
Tout est déjà écrit
Il n'y a pas à innover"

  Au cours des débats qui se succèdent dans les médias à propos de la Burqa , l'intégrisme islamique" est abondamment évoqué sans que personne ne s'attarde à s'interroger sur ce qu'il signifie exactement. L'expression est lancée comme l'étiquette pratique d'un emballage dont on ignore le contenu. Or, la meilleure définition qui puisse être donnée de l'intégrisme islamique c'est celle qu'en donnent les intégristes eux-mêmes d'autant qu'ils le font sans artifice, forts de leur certitude, persuadés qu'ils sont de détenir la vérité unique et absolue.

Un manifeste théocratique

Voici cette définition telle qu'elle est exactement et généralement donnée par les gens de la mouvance des Frères musulmans et que j'emprunte à un article écrit il y a quelques années -mais plus que jamais d'actualité- par un universitaire islamiste  dans le quotidien saoudien Asharq al-awsat sous le titre "La démocratie est un principe contraire à l'Islam":

" Chacun de nous sait que l'Islam est un système de vie intégré (1) dont découle l'ensemble de l'organisation de la vie y compris le politique, le social et l'économique. En Islam il n'y a pas de séparation entre la religion et la vie. La "gouvernance" (2) n'appartient qu'à Dieu seul et les sources  de la législation islamique sont bien connues" (3).


L'auteur écrit: "... Si on examine la définition de la démocratie dans le détail concernant la relation entre le peuple et le gouvernant, on constate que la démocratie est de façon flagrante en contradiction avec l'Islam" puisqu'elle repose sur "la séparation de la religion et de la vie et fait de la communauté la source de la législation et des pouvoirs".

La démocratie, ajoute l'auteur "consacre  et  garantit  des libertés individuelles telles que la liberté de croyance, la liberté d'opinion, la liberté de  propriété et la liberté personnelle'. Or, précise-t-il, "il n'y a pas dans l'Islam consécration de la liberté dans son concept absolu tel qu'on le trouve en démocratie et bien que l'Islam par exemple n'oblige pas les gens à épouser une croyance précise, il n'autorise pas le musulman à changer de religion et celui qui sort de l'Islam est considéré comme un apostat à qui est appliquée la sentence prescrite dans ce cas. (note du trad: la mort selon les extrémistes bien que le Coran soit muet sur ce sujet).

L'auteur  poursuit: " La libre propriété individuelle telle qu'elle est conçue en démocratie n'existe pas en Islam. L'Islam définit les sources de la propriété et ne permet pas son acquisition par les moyens de l'usure,  de la spéculation  ou du gain excessif. Il en va de même de la liberté personnelle, qui, telle qu'elle est conçue en démocratie, n'existe pas dans l'Islam. Ainsi, il n'est pas permis aux femmes de marcher dans la rue à demi-nues et l'Islam interdit la mixité, la luxure et l'homosexualité entre autres nombreuses choses. Et ici nous arrivons à la conclusion que la démocratie est étrangère à l'Islam qu'elle enfreint de manière manifeste".

(commentaire)


Ce texte nous ramène à la double confrontation entre la raison et la foi  d'une part puis d'autre part entre le droit positif et la pratique relgieuse qui a fait  débat depuis les premiers siècles de l'Islam parmi les penseurs musulmans au contact d'abord de la pensée des philosophes grecs puis bien plus tard et jusqu'à aujourd'hui au contact de la civilisation occidentale nourrie de l'esprit des "Lumières". 

Au sein de la communauté musulmane, des esprits éclairés ont tenté et tentent aujourd'hui encore de promouvoir une conciliation entre la raison et la foi et entre le doit positif et les préceptes islamiques (4). Ils ont été et sont encore peu entendus dans leur opposition à ceux aujourd'hui très actifs pour qui "l' Islam est à la fois religion et état" et le Coran valable dans sa lettre "en tout lieu et pour  tous les temps", deux slogans bien connus de l'Organisation des Frères musulmans.

On ne voit pas comment ceux qui prêchent ces principes peuvent avoir place dans notre ensemble national. C'est logiquement en vertu de ces mêmes principes qu'un mufti (jurisconsulte) nommé Al-Wancharissi avait, au XVe siècle, enjoint les musulmans d'Espagne de quitter ce pays après la Reconquista, estimant qu'un musulman ne pouvait se soumettre à une autre loi que celle de l'Islam.

(1) منهاج متكامل  Aveu d'intégrisme on ne peut plus explicite .
(2) J'utilise à dessein ce néologisme pour traduire précisément celui employé par l'auteur, à savoir حاكمية "hakimiyya", mot inexistant dans les dictionnaires arabes et inventé par les islamistes radicaux comme Sayyid Qotb pour  désigner le pouvoir absolu de Dieu sur l'organisation de la société civile.  Ce qui correspond au slogan des Frères Musulmans:  "L'Islam religion et état"  الاسلام دين ودولة
3) Le Coran et la Sunna (tradition prophétique).sur lesquels est fondée la loi islamique dite Charia الشريعة.

Publié dans actualité politique

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